Avertissement

L'imagination me fait défaut. Vraiment. Ma mémoire elle-même ne sait pas enjoliver. Ceci pour souligner le côté vécu, authentique et sans fioritures des pages qui suivent, tirées des cartons où se sont empilés mes écrits quotidiens, carnets, journaux de bord, lettres à la famille ou courriers échangés avec d'autres navigateurs.

Des courriers, souvent réexpédiés de port en port dans notre sillage, qui symbolisent un temps presque oublié, d'avant Internet ou le GPS. Pensez, les télégrammes et le morse avaient encore de belles décennies devant eux ! C'était une époque où l'on suivait le mouvement des astres, où le grand départ se vivait sans idée de retour et où l'improvisation pouvait régir une existence.

On faisait alors un usage parcimonieux de la photo, sans compter que le matériel souffrait beaucoup et que dans les contrées reculées il n'était pas simple de trouver un labo compétent ou des pellicules non périmées. Ce dont je me désole, au vu des souvenirs graphiques qui accompagnent ces récits ; merci d'être indulgent pour de nombreuses images qui ont surtout valeur de document.

Enfin, les souvenirs évoqués dans ces pages ont trait au monde maritime, ce qui implique un vocabulaire spécifique ; les termes spécialisés, ainsi que certains mots exotiques, sont soulignés et expliqués dans un glossaire, en fin d'ouvrage.

En relisant la première ligne de ce préambule, je me dis que contrairement à ce que j'ai pensé jusque là, je bénéficie d'une part d'irrationnel. En effet, dès le début de ces années de navigation, mes intuitions face aux éléments naturels se sont révélées plutôt pertinentes. La mer, les vagues et le vent sont mon domaine, j'en ai l'intime conviction. À défaut d'imaginaire...