La croisière en Irlande

Au moment d’aborder la relation de cette croisière, je me désole à l’idée de devoir accabler un ami très cher, quand bien même le propos sera édulcoré. Mais quelqu’un d’aussi catastrophique que Gilbert par rapport aux choses de la mer et du vent, et qui ne fait rien pour progresser, ce n’est vraiment pas possible. Encore aujourd’hui, ce blocage pathologique reste un mystère à mes yeux, s’agissant d’un autodidacte brillant dont j’admire la culture hétéroclite. Avec le recul, j’ai au moins compris que le rêve marin de Gilbert aurait été un Santoux dépourvu de tout gréement et cantonné à des eaux intérieures sans vagues, ni courants et autres tracas. C’est d’ailleurs un peu à quoi ont ressemblé les navigations de Gilbert et Claude durant l’année qui a suivi la mise à l’eau de leur bateau, à savoir des allers et retours au moteur sur la Vilaine, au départ de La Roche-Bernard.

Début juillet, par un temps exécrable, nous retrouvons cette cité, qui avait marqué le terme de la sortie inaugurale de Santoux. Le ton est vite donné, car je commence par devoir monter aux mâts pour récupérer les drissesdrisse : cordage servant à hisser une voile ou un pavillon. que Gilbert a pris soin d’envoyer en tête au désarmement ; cependant j’ai bien fait de ne pas montrer d’agacement, puisque après avoir remonté l’enrouleur de génois, j’en coupe deux mètres qui paraissent de trop, en fait non... L’embellie se fait attendre trois jours durant, que Gilbert met à profit pour s’échiner sur l’hydraulique de la barre à roue, qui est de son ressort ; il apparaît pour finir qu’il faudra changer le vérin et nous n’aurons donc pas de pilote automatique. La météo devenant enfin maniable, Santoux retrouve l’océan après avoir côtoyé, dans l’écluse d’Arzal, un drakkar en route (au moteur) pour les festivités de Brest 2000. La traversée vers l’Irlande commence par un louvoyagelouvoyage : action de remonter le vent en tirant des bords (en zigzag). sous grand-voilegrand-voile : voile principale sur un voilier à mât unique ou plus grande voile porté par le plus grand mât sur un voiliers à mâts multiples. à deux risris : dispositif permettant de réduire la surface d'une voile. et génoisgénois : la plus grande des voiles d'avant. réduit, le premier bord vers Hoedic, le second vers Le Crouesty, puis la brise forcit, obligeant à prendre un risris : dispositif permettant de réduire la surface d'une voile. dans l’artimonartimon : mât le plus à l'arrière d'un voilier ou voile triangulaire portée sur ce mât. et à réduire encore devant. Crevés, trempés de sel et les oreilles pleines du vent qui hurle, nous trouvons refuge devant Beg-Rohu, à l’abri de la presqu’île de Quiberon, alors que le mauvais temps redouble. Enseignements de la journée : si le bateau est fiable, Gilbert laisse à désirer également sur le plan physique, car il y a un bord sur lequel il ne peut pas barrer en raison d’une épaule défaillante, séquelle de son crash en parapente...


Le drakkar Vinland dans l’écluse du barrage d’Arzal.

Le lendemain s’annonce bien, avec du ciel bleu et un petit vent d’ouest qui nous voit partir à la voile pour deux bords grand largue avant de tourner la Teignouse et de passer au près serré, cap sur Groix. Beaucoup de beaux voiliers convergent vers Brest, dont le drakkar de la veille, puis brume et crachin noient tout le panorama, à l’exception de l’île aux Moutons des Glénan, aperçue dans une trouée. Les prévisions météos exécrables pour les trois jours à venir imposent une escale à Sainte-Marine, sur l’Odet, rallié au GPS. Dans le reste du pays, nous apprend la radio, le tour de France a été arrêté car le vent souffle à 150 km/h au Ventoux, tandis que les cols des Alpes sont fermés par la neige, qui est également tombée sur le Sancy ! Voilà comment, en plein mois de juillet, la choucroute de ce soir-là est tout à fait de saison.

Cette pause donne le loisir de flâner à Sainte-Marine, plaisante bourgade riche d’hortensias, d’expositions de peinture, de grandes propriétés et d’un Abri du Marin remarquable (il s’y trouve aussi une Coopérative des Pêcheurs où je me procure du boutbout : bout qui se prononce « boute », désigne, de façon générale, un cordage sur le navire car le mot « cordage » n'est jamais utilisé par les navigateurs. pour l’enrouleur.) J’aurais souhaité qu’on aille faire du tourisme nautique en amont de l’Odet, où Tabarly avait basé Pen Duick, premier du nom, au bas de sa demeure, mais Gilbert craint de ne pas retrouver sa place, si bien que nous faisons du moteur au ponton, pour entretenir le frigo. Le feu d’artifice du 14 juillet fuse depuis une barge amarrée au milieu du fleuve et la foule se presse derrière nous, qui sommes aux premières loges ; puis les flonflons du bal sont interrompus par des bourrasques de pluie et toute trace de vie disparaît.


Santoux en attente de l’embellie au ponton de Sainte-Marine.

Des prévisions annonçant que le vent va se calmer et tourner au nord nous font larguer les amarres en milieu de la journée suivante pour avoir la bonne marée au raz de Sein. Santoux sort ainsi de l’Odet voiles en ciseauxciseaux (voiles en) : se dit des voiles établies d'un bord et de l'autre, au vent arrière., sur une eau plate et par un gentil force 3 ; Gilbert demande à barrer et une minute plus tard c’est l’empannageempannage : virement de bord vent arrière..
-Le vent à tourné...
-Non Gilbert, c’est le bateau qui a changé de cap, pas le vent.
Plus tard, vers la pointe de Penmarc’h, on vire la balise de Spinec et je borde pour passer au près.
-Tiens, le vent revient.
Aïe, aïe, aïe...
L’entrée du raz de Sein se précise au crépuscule, pendant un calme heureusement transitoire, puis sur une mer qui bouillonne un peu, un petit bord permet de parer Tévennec, avec l’aide du courant, comme prévu. On renvoie ensuite le génois pour une longue route au nord-ouest vers les îles britanniques. Un trois-mâts glisse à contre-bord, les phares tournent partout, de Sein à Ouessant, c’est une superbe ambiance.


Le vent tombe au crépuscule, aux abords de la pointe du Raz.

En fin de nuit, le vent tombe et cette traversée va se poursuivre plus au moteur qu’à la voile, ce qui a au moins l’avantage de simplifier le croisement des rails des cargos. Au sortir de la nuit suivante, pleine de lune, nous apercevons l’archipel des Scilly. Sur une mer d’huile, des dauphins nous accompagnent longuement, puis nous coupons la route d’un troupeau de globicéphales qui communiquent entre eux en sifflant de diverses manières. Le ciel s’emplit de pétrels, de puffins, de fous et surtout de soleil : en début d’après-midi, l’équipage goûte le luxe de quitter un temps pulls et chaussettes. Il nous manque une carte de la mer Celtique et Gilbert est très perturbé, pendant six ou sept heures, de ne pas voir notre position reportée quelque part.
-Au fait, Gilbert, tu as vu que le compas à pointes sèches est tout rouillé.
-Ce doit être parce que j’ai pris un compas de maçon (comprendre « de franc-maçon »).
Je trouvais bizarre, aussi, qu’il se préoccupe de fournir un instrument de navigation...


Notre escorte de dauphins en Manche.

Au matin du troisième jour, la baie de Cork est en vue et un ferry nous montre le chemin vers la ville, qui occupe l’extrémité d’un chenal long et sinueux. Stupeur en découvrant le port : je n’ai jamais vu un endroit aussi encombré, avec des voiliers à couple par cinq ou six et une rivière complètement prise par les bateaux sur coffre. On explore les lieux en se faufilant avant de revenir au Royal Cork Yacht Club, où Santoux s’agglutine à une grappe de voiliers de course. Il faut maintenant trouver un téléphone pour convenir d’un rendez-vous avec notre amie Claudie, qui a prévu de nous rejoindre en Irlande. On grimpe jusqu’à la cathédrale pour apprendre que la poste est tout en bas, et là, on se souvient qu’en ce pays, la poste, ce n’est pas le téléphone... Retour vers le port au milieu d’une énorme foire et de centaines, sinon de milliers d’équipiers qui affluent vers les bateaux : nous étions les seuls à ignorer que du 15 au 21 se déroule ici la très fameuse Semaine de Cork ! Je finis par établir le contact avec Claudie et nous revenons au ponton. Plus de bateau ! Il a été déplacé pour permettre le départ des voiliers voisins pour leur régate, et au passage une manivelle de winchwinch : petit treuil à main servant à raidir les drisses et les écoutes. a disparu. On retrouve Santoux amarré en sauvage en travers du fort courant. J’appelle à la rescousse un équipage anglais pour les manœuvres d’amarres et on réussit à se sauver sans faire de dégâts.


Au milieu des régates de la Semaine de Cork.

Dans le chenal de sortie, c’est une folie, un embrouillamini de voiliers de toutes tailles. Bientôt dégagés du troupeau, nous louvoyons tranquillement vers l’ouest, à ras du rivage, avec la marée pour nous ; tenté de faire un tribord à toute la flottille, je me contente d’apprécier les manœuvres des voiliers les plus proches, tandis que les gémissements des cordages tendus à bloc troublent la quiétude ambiante. Il fait grand beau et l’on peut mettre à l’air les pieds et les jambes, mais ça ne dure pas -la bonne marée non plus-, et il faut se couvrir bien avant l’entrée de Kinsale. Il s’agit d’un estuaire agreste qu’un coude abrite du large et le mouillage devant la petite ville y est très agréable ; nous allons faire quelques emplettes bien que le menu soit déjà fixé car la veille Gilbert a préparé un kilo de coquillettes.


Old Head of Kinsale.

Départ matinal, sans vent, au moteur et au soleil. La côte défile et le coup d’œil est un régal. Au bout de deux heures, peut-être, Gilbert, qui était resté dans sa cabine, pointe le nez et me fait remarquer que le baromètre est monté « Du A jusqu’au T » (?). Là, d’un coup, le brouillard arrive comme un mur face à nous : on n’y voit pas à plus de vingt mètres, toutefois il y a du vent, que l’on remonte en surveillant le GPS.
-Gilbert, il faut être cap-hornier pour se permettre de pisser au ventvent (au) : du côté du vent, (sous le) vent : à l'opposé du vent.. (Et évite de le faire juste devant moi, complétai-je in petto...) Comment peut-on avoir une relation au vent aussi épouvantable ? Ceci dit, la barque de Gilbert est déjà bien chargée, j’arrête d’en rajouter.

Trois heures après, le ciel bleu est de retour et le vent tombe. Au moteur, nous slalomons pour contourner les nombreux filets posés devant ce littoral, avant de mouiller à Barloge Harbour, un extraordinaire abri secret, à l’entrée très étroite. Nous y sommes seuls, c’est inespéré. Après un saut à terre pour prendre de la hauteur sur le site, nous entreprenons de remonter le bras de mer qui rejoint le lac Hyne, mais la marée descend encore et le hors bord n’est pas assez puissant pour franchir les rapides. On patiente, le courant s’inverse et nous passons comme des fusées. Une fois le lac exploré, y compris l’île qui s’y trouve, où s’élèvent les ruines d’un château, au retour, nous sommes bloqués par le flotflot : marée montante. ! Il faut débarquer et haler l’annexeannexe : petite embarcation pour assurer la liaison entre un voilier et la terre. depuis une sorte de quai construit à cet usage. À nouveau en eau calme, nous dépassons Santoux et partons en mer pour contempler la petite île Bullock qui protège le mouillage ; nous pouvons d’ailleurs en faire le tour et revenir au bateau par la baie Tragonna, car le banc de sable qui la coupait de Barloge est maintenant recouvert par la marée.


Barloge Harbour, avec à gauche le banc submersible qui donne sur la baie Tragonna.

Au loin, le lac Hyne et Castle island.

Gilbert hâle l’annexeannexe : petite embarcation pour assurer la liaison entre un voilier et la terre. pour le passage des Rapids.

Santoux ne fera pas davantage d’ouest et je ne verrai sans doute jamais le mythique phare du Fastnet qui jalonne, non loin, l’extrémité méridionale de l’Irlande. Ce retour commence de bon matin par quelques milles de moteur jusqu’à Castle-townsend, un joli petit port d’estuaire ; le mouillage ne saurait être plus calme et la bourgade plus charmante, authentique et fleurie à foison. « Oh, ces hortensias, et ce seringa, ces fuchsias, ces acanthes ! Et tu as vu ces yuccas, ils ont au moins quatre mètres de haut. Et ces volubilis ! » On n’arrête pas Gilbert. Le temps de faire un tour à l’église, entourée d’un joli cimetière, et nous redescendons de ruelles en allées pour reprendre la mer. Le vent est passé au sud-est, ce qui fait qu’on est toujours au louvoyagelouvoyage : action de remonter le vent en tirant des bords (en zigzag)., avec en point de mire les grottes traversantes de Holeopen bay, creusées dans les falaises du cap de Kinsale. Au soleil couchant encore chaud, on met au moteur pour aller laisser tomber l’ancre à Oysterhaven, près d’une belle goélette moderne. Sur la colline au-dessus de la rivière, une moissonneuse-batteuse au travail est seule à troubler le grand calme d’une campagne sans village ni route.


Castletownsend.

Le village fleuri.

Les falaises percées de Hole Open bay.

Réveillés de bonne heure par le chant d’un coq et le meuglement des vaches, nous respectons la quiétude des lieux en appareillant à la voile pure. Le vent souffle de l’est-nord-est. Rien que de très normal, c’est là que nous allons... Il est monté à force 5 quand nous abordons la traversée de la baie de Cork au milieu des régates, au près tribord amures, rois des mers. La meute qui arrive sur nous est sous spi et nos routes semblent être compatibles jusqu’au moment où tout s’emmêle sur un concurrent, qui nous oblige à virer en catastrophe pour ne pas le percuter, et par ricochet nous coupons la route d’un autre voilier. Pendant un moment, nous sommes coincés entre deux voiliers aux spis en vrac, à moins d’un mètre parfois... La situation se débloque avec beaucoup de bonne volonté réciproque, en s’aidant de signes de la main. Le vent a encore forci quand nous remontons le chenal au moteur et Gilbert décide de garder la barre pour la prise de ponton. Je sais longtemps à l’avance qu’il va rater sa manœuvre, car il n’a jamais jeté un œil à la girouette. Il échoue une première fois, ne comprend pas pourquoi, rate à nouveau et me confie la barre : opérant en sens inverse, je me sers évidemment du vent pour casser l’erre du bateau, qui vient mourir sur le ponton. Enfantin. En revanche, pour aller faire du fuel au milieu des bateaux de course qui commencent à revenir, c’est une autre paire de manches et pour la première fois je m’emporte contre Gilbert qui ne comprend pas pourquoi il faudrait qu’il cesse de s’occuper de l’amarre sous le ventvent (au) : du côté du vent, (sous le) vent : à l'opposé du vent. pour se tenir prêt à passer, très vite, celle qui sera au ventvent (au) : du côté du vent, (sous le) vent : à l'opposé du vent.. J’enrage de tant d’incompétence et, comprenant le problème, l’équipage du Swann auquel on doit se mettre à couple me vient en aide.

Au soir, je vais à terre attendre Claudie. C’est la proclamation des résultats des régates et la foire bat son plein à grand renfort de fanfares et de boissons alcoolisées. Je ne sais comment nous avons pu nous retrouver dans cette foule. Le lendemain, la météo prévoit de forts vents d’est, ce qui me décide à laisser porter vers Kinsale avant la traversée de retour. Enfin un peu de largue et de grand largue et même quelques minutes vent arrière avec le tangontangon : espar qui amure le spinnaker ou le génois d'un voilier.. Dans la rivière, j’ai le plaisir de constater que Santoux remonte au ventvent (au) : du côté du vent, (sous le) vent : à l'opposé du vent. sous grand-voilegrand-voile : voile principale sur un voilier à mât unique ou plus grande voile porté par le plus grand mât sur un voiliers à mâts multiples. seule, pour peu qu’il soit lancé. Notre trio flâne en ville de devantures de pubs en galeries de peinture ou de photo, avant de partager un pot face au port ; la ville est coquette, chic et de bon goût en général, et l’on sent le soin que chacun apporte à son cadre de vie.


Le mouillage d’Hugh Town, aux Scilly.

Le départ matinal fait changer d’ambiance avec un bon force 5 pile dans le nez : ça tape beaucoup et il y a même une déferlante qui remplit le cockpit et saute dans le carré, car nous n’avions pas mis le panneau de fermeture. Gilbert me désole de manière inédite quand je le vois tourner un winchwinch : petit treuil à main servant à raidir les drisses et les écoutes. comme un forcené sans jamais regarder ce qui se passe au bout de l’écoute... Claudie est malade et restera réduite à rien pendant vingt-quatre heures. La nuit est froide et pénible, à deux seulement à se relayer à la barre ; le cap n’est pas direct vers les Scilly, mais heureusement le vent adonne en faiblissant et au lever du jour Santoux est encalminé aux approches de l’archipel. Le crachin s’atténue peu à peu et les îles sortent de la brume. La ville de Saint Mary (Hugh Town) a l’air sinistre avec ses maisons grises, la pimpante Irlande est loin. Mouillage à l’écart du port et promenade à terre avec Claudie à nouveau en forme. Le cadre est effectivement moins attrayant qu’en Irlande, mais il y a une abondance de fleurs et de plantes inconnues, même de Gilbert.

Tout en prenant le petit déjeuner dans le cockpit, nous quittons l’archipel au moteur et dès la dernière bouée tournée un vent timide se lève qui permet de marcher au près, presque bon pleinbon plein : allure de près confortable, mais moins efficace que le près serré. et en route directe. Cette brisette nous emmène en douceur sur une mer apaisée, cependant à l’aube il faut repasser au moteur. Bientôt Ouessant est en vue, puis nous passons le chenal de la Helle en laissant à tribord la série de cailloux qui va de Molène à Béniguet. En mer d’Iroise apparaît un petit air qui dure jusqu’après le raz de Sein. La mécanique ronfle de nouveau pendant mon quart, qui fait passer Penmarc’h, puis celui de Gilbert laisse les Glénan dans le sillage. Au réveil, je me rends compte qu’il y a suffisamment de vent pour faire route à la voile, ce que Gilbert s’est bien gardé de remarquer et mon état d’esprit est aussi sombre que le ciel, bientôt envahi de crachin.


Claudie, au retour d’Irlande.

Avant les Birvideaux, le zéphyr prend du muscle et autorise une route directe au près vers Belle-Ile. Au portable, je contacte Mado qui s’y trouve en vacances, et nous nous donnons rendez-vous à port York. Pile à l’heure dite, l’ancre plonge et je ramène en annexeannexe : petite embarcation pour assurer la liaison entre un voilier et la terre. nos visiteurs, Mado, son frère Dominique, ses enfants et son beau-frère.


Mado et sa famille en visite à bord à Belle-Ile.

Après cette chaleureuse parenthèse à bord, Claudie et moi allons crapahuter sur le Gros Rocher, au milieu des mouettes. La tranquillité de l’escale est gâchée par un voisin paranoïaque qui vient se plaindre de ce que Santoux ait évité au-dessus de son ancre. Du jamais vu. Ma journée d’anniversaire aura été faite de hauts et de bas...


Vu du Gros Rocher, Santoux à Port York.

Le lendemain, départ au portant, tangontangon : espar qui amure le spinnaker ou le génois d'un voilier. à poste dès l’appareillage, pour passer entre les récifs de l’île aux Chevaux et d’Houat, puis diablement près de Er Spernec Bras, où le courant nous dépale dans une accalmie. Le vent revient bien ensuite et le bateau déboule dans la baie de Quiberon, tout dessus avec la trinquettetrinquette : voile d'avant placée entre le foc et le mât. et le deuxième génoisgénois : la plus grande des voiles d'avant. en ciseauxciseaux (voiles en) : se dit des voiles établies d'un bord et de l'autre, au vent arrière.. Dans l’écluse d’Arzal il y a un beau cirque avec le fort vent qui pousse, et la remontée de la Vilaine est entrecoupée d’empannagesempannage : virement de bord vent arrière. musclés. Sous le pont de La Roche-Bernard, notre coffre est pris par des Anglais qui viennent de s’y amarrer. Je leur explique que l’emplacement est à nous, ce à quoi ils rétorquent qu’ils y sont depuis deux semaines, avant de descendre dans leur carré pour se mettre à table. Ces maudits rosbeefs font la sourde oreille quand on refait un passage à ras de leur bord et ils ne décamperont qu’après une sérénade à la corne de brume. Bienvenue parmi les plaisanciers de l’été en France !

(juillet 2000)