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DépartVeille13 Avril 2003LendemainArrivée



Écoutez le journal audio (le son original de la traversée !) :





Journal écrit :
Temps très nuageux. Au lever du soleil (lueur), on aperçoit l'est. Le vent souffle à 5 ou 6 de l'Est. On se remet en route, mais pas au maxi... ! On en a marre de ne jamais voir d'étoiles.

Dans la journée, très bonne route sous M1 + tourmentin vers l'Ouest. On aperçoit bien le soleil.

A la nuit, on garde le tourmentin pour pouvoir dormir et faire route vers l'Ouest. Swell 3 à 4m de NE. Nuit nuageuse, mais de temps en temps une étoile... On voit enfin la Croix du Sud et on en déduit que nous sommes presque à la latitude 19°ou 18°

La route du jour :

 Zoom ]

Journal audio (transcription) :



Plage 17

Man : Dimanche 13 , au matin. On a passé toute la nuit à la cape courante… avec le tourmentin bordé plat… et la barre au milieu… (Il rigole) et on a pris l’option de dériver avec le vent…vers je ne sais pas… 2-3 nœuds…Le vent était très fort hier soir, on a été obligé de décompresser parce que… on n’a aucune visibilité, aucune visibilité…le ciel est toujours très très nuageux…Et on a préféré attendre le matin…

Max : Ça fait combien de jours qu’on n’a pas vu la Croix du Sud ?

Man : Ça fait… Je ne sais pas moi ! Ça fait au moins 5 jours qu’on n’a pas vu les étoiles du Sud ! La Croix du Sud… du tout !

Max : On ne voit pas d’étoiles !

Man : Aucune étoile quoi ! Enfin si, on aperçu Jupiter… entre deux nuages… Bon enfin, on a remis en route… petite misaine mais sur le grand-mât… ça marche pas mal… on va vers l’Ouest puisque matin, on a eu la chance d’avoir un… un lever de soleil quand même ! Dans la grisaille… c’est entièrement couvert… mais on a quand même aperçu l’Est avec le soleil… Donc le vent porte plutôt Ouest… souffle de l’Est… donc on prend vent arrière euh… La mer est toujours absolument dégueulasse… Vraiment, vraiment, on insiste là dessus, la mer est très très dégueulasse… C’est pour ça qu’on s’est arrêté hier soir parce que… parce que le bateau est très très très inconfortable… dès qu’on avance un peu vite… ça saute droite-gauche, il y a des accélérations terribles de tous les côtés… C’est strictement impossible de dormir quand on est à l’intérieur…et donc on ne peut pas se reposer quoi…

Max : Ben ça fait peur quoi !

Man : Ouais, ça fait tout simplement peur quoi… Oui. (il rigole)

Max : Ça fait salement peur !

Man : Bon voilà. Ce qu’on pense… oui, voilà… On est dimanche 13… et on arrive enfin au lundi 14… Vers le 15, on sera à la moitié de notre douleur… Et il nous restera plus qu’à souffrir encore la moitié ! Pour arriver en face ! Parce qu’on souffre là, on souffre ! On n’a aucune compensation en regardant le ciel quoi… Vraiment, vraiment, on est paumé… Totalement paumé ! Oui ! On souffre…

Plage 18

Man : Ah oui, j’ajoute qu’hier soir…enfin hier dans la journée en fait… on avançait à toute petite vitesse… il y avait du petit temps plutôt… c’était assez agréable… et on n’a pas du tout toilé parce que… on avait envie de se reposer, et puis on craque un peu…

Max : …pour faire sécher quoi…

Man : et pour faire sécher les affaires parce que… tout est mouillé… et c’est important de relâcher quoi… Et on en a profité pour faire des photo, de la vidéo… des plans un peu spéciaux… Et alors, (il rigole) pour montrer qu’on n’est pas complètement foutu euh…à ceux qui nous regardent sur Internet…ou je ne sais pas quoi… grâce à la balise Argos… on a fait un rush à un moment en remettant la toile sérieusement… Mais alors ça fait peur… on était en surf en permanence, mais comme la mer est très très croisée…on ne sait pas si il y a une vague vicieuse qui se présente par le travers quand on surfe… Il y a des vagues qui se présentent en crochet, en bowl comme on dit en surf… ça fait très très peur… latéralement… Et donc, on a peur de se faire prendre là dedans. On a donc du relâcher avant la nuit ! Evidemment ! Sans ça, on ne peut rien faire, on ne pense qu’à regarder le flotteur sous le vent… C’est terrible !

Plage 19

(bruit d’eau qui court le long de la coque, relativement calme…)

Max : On est le dimanche 13 Gromf ?

Man : (à travers la bulle) Dimanche 13 ouais !

Max : Dimanche 13. A bord du Micromégas III, au environs de midi solaire, je ne sais pas… Il est presque zénithal… La mer est toujours bien hachée, 3m de creux… consistant… et on file, on file, on file… On file et on essaye de se reposer… de temps en temps dans la coque et… on n’arrive même pas à s’endormir… De jour ! Parce que c’est quand même impressionnant ces démarrages en surf… dans les vagues. Voilà ! (il rigole) Alors on réfléchi un peu à ce que ça peut être sur un grand bateau, sur un vrai bateau… Quels sont les problèmes à côté des nôtres… On imagine les grands bateaux ! « Eh ! tu as oublié les glaçons ! »… pour l’apéritif, ou alors : « c’est ton tour de vaisselle ! »… des choses comme ça, des trucs de grande banalité, mais ce qui fait que c’est de la vie normale ! Alors que nous, c’est un travail incessant de tenir ce bateau dans son cap ! Même de se reposer, c’est un travail ! Il faut se concentrer pour essayer de s’endormir… Enfin, se concentrer… faire le vide… Faire le vide voilà ! C’est ça à bord de Micromégas III… C’est très difficile !

Man : (à travers la bulle) C’est terminé ?

Plage 20

Max : Vas-y Gromf !

Man : Oui ! Dimanche 13, donc euh… dans deux jours, on en sera à quinze jours de voyage… De voyage ! D’expédition je veux dire ! Alors ce qui est très étonnant, c’est que le bateau est tellement prenant que… avec la mer qui est difficile… qu’on ne pense strictement pas à la terre ! Alors même euh… sans transistor et tout ça… on est hors de tout… on est vraiment sous les étoiles, et en l’occurrence sous rien du tout puisqu’il n’y a pas d’étoiles ! Et bien on ne pense même pas à la terre ! On ne pense pas à nos amis… On ne pense pas à …

Max : On ne pense à rien du tout !

Man : …à la guerre… On ne pense à rien du tout, on est des bêtes en train de survivre en fait ! Tout simplement ! C’est étonnant ! Moi j’ai une petite fille, qui s‘appelle Marine… je n’y pense pas quoi… Je ne pense à personne !… Si ! On pense plutôt à ce qu’on va faire plus tard… Lorsqu’on arrivera… quelque part, on ne sait où… C’est plutôt ça quoi… notre souci…

Max : On pense aussi à ce que sera notre arrivée… sans étoile, elle est bien incertaine… où est-ce qu’on va arriver ? Pour le moment, c’est vraiment difficile de le dire… On espère quand même arriver sur le chapelet des Antilles ! Mais maintenant, on broie du noir ! On se dit… avec un coup de mauvaise visibilité… un gros temps… on peut même passer entre deux îles sans les voir ! On ne sait pas, ça peut arriver ! Après, ce serait tout le golfe du Mexique à traverser… Bon, ce sont des idées noires qui passent comme ça… Bon, il y a des idées positives… on se dit, même si on arrive sur une autre île… évidemment, ce sera là notre arrivée… Une sorte d’échec pour ceux qui diraient qu’on n’est pas arrivé en Guadeloupe… Mais ce sera une réussite totale puisqu’on aura traversé l’Atlantique sans instrument et sans boussole… Et puis le premier truc qu’on fera… c’est d’acheter une boussole, une carte, pour essayer de croiser jusque en Guadeloupe quoi…Ou en Martinique peut-être ? Je ne sais pas… Acheter une boussole ! Acheter une boussole !

Man : Ouais, en plus… Chaque fois qu’on en bave sérieux dans un changement de voilure, ou quand le temps se fâche… quand le vent monte trop fort… et qu’on a beaucoup de difficultés à ramener la toile tout ça… C’est très difficile avec ce gréement ancien… (il rigole) Alors on se met à rigoler ! On gueule : « Assume ton concept » parce que tout ça, évidement… c’est un concept ! Puisque ce bateau n’est qu’un… accessoire de film qu’on a…

Max : …une pièce de décor…

Man : …une pièce du décor…Le décor, c’est la mer… Le bateau est un accessoire qu’on a dessiné et fabriqué comme un réalisateur de cinoche…

Max : …et le film, on le tourne tous les jours…

Man : …et alors le film, on le fait tous les jours… Alors il faut qu’on assume notre concept ! Parce qu’en fait, on n’est pas du tout des marins nous ! Nous on ne naviguait jamais ! Notre dernière traversée, c’est pareil ! Sur notre 4m, on a sorti le bateau de notre grenier, enfin, pas de notre grenier, mais on l’a fait dans le garage d’un copain plutôt… On l’a mis à l’eau et on est parti en Amérique avec… On n’y a jamais été en avion !

Max : On n’a jamais navigué !

Man : Et avec ce bateau-là, on n’a jamais navigué non plus… On l’a sorti du grenier… on l’a mis à l’eau… et puis on est allé aux Canaries dans un premier temps… et puis maintenant, on traverse l’océan ! Mais sans ça, on ne navigue jamais nous !

Max : On ne navigue jamais. On n’habite pas en Bretagne, on habite dans les Landes… il n’y a pas de port… On ne navigue pas…Jamais ! ! !

Man : Enregistre le caca !

Max : Ouais !

(son extérieur de l’eau qui file…)

Man : Temps très nuageux comme d’habitude ! Ça promet une nuit absolument dégueulasse…Si ! on aperçoit un petit peu le soleil en ce moment ! ça aide ! Donc on se dirige vers le soleil…(il rigole) théoriquement, on va vers l’Ouest ! Mais alors cette nuit, ça promet… parce que la mer, c’est absolument n’importe quoi !

Max : On en a vu des plus jolies, des mers !

Man : Oui ! Parce que dans cette mer, on est obligé d’aller lentement…Sans ça, c’est très dangereux…

(son extérieur de l’eau qui file…)

Max : Alors on pense aussi à… aux héros des temps modernes… les… les héros maritimes ! Les Kerzauson, les Bourgnon… les D’Aboville, etc… Alors évidemment, goûtant du même pain qu’eux, on comprend comme ils sont formidables… puisqu’ils en ont bavé sérieusement ! Derrière les splendeurs médiatiques… les réussites de ces gens-là…

Man : Il y a beaucoup de souffrance…

Max : Beaucoup de souffrance qu’on ne voit pas ! Et bien sûr qu’ils ont souffert ces gars-là ! Beaucoup ! Et ça nous…(il rigole)…ça nous réconforte ! Non, ça ne nous réconforte pas, mais bon… on partage, on partage !

(gros bruit d’une vague surfée…)

Max : Voilà, très bien ! (il parle du son de la vague…)

Man : Sympa !…

(encore un gros bruit d’une vague surfée…)

Man : …quand ça part dans un surf merdique ! T’es content ! (gros bruit de sillage) Non vraiment ! On ne pense pas à la bagatelle ! Nos copines… elles sont loin ! Malheureusement… mais enfin, ça se rapproche ! Dans quinze jours peut-être ?

Max : Dans quinze jours, on leur fait leur fête !

Man : Dans quinze jours, on leur bigophone… Si on arrive ! Si on ne rate pas les îles !


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